Ces dernières semaines, des automobilistes soutenus par une poignée d’hommes politiques s’activent pour dénoncer l’augmentation des prix du carburant et notamment du gazole, allant jusqu’à accuser le gouvernement de faire les poches des automobilistes pour faire rentrer de l’argent frais dans les caisses.
Une rhétorique qui revient régulièrement dès que les prix du carburant remontent.
Une hausse principalement imputable à la flambée des prix du brut
Au 24/10/2018, le prix moyen du gazole était de 1.53 € et de 1.57 € pour le sans-plomb 95 E5. Il s’agit de la plus forte augmentation depuis 2012 où les cours du pétrole avaient fortement augmenté en euros avec +23% pour le Brent et +35% pour le WTI, avant de rebaisser.
Voici encore 2 ans, le prix moyen du pétrole se situait autour de 30 dollars le baril, soit le prix le plus bas, contre plus de 80 dollars le baril en octobre 2018. Les spécialistes tablent aujourd’hui sur une hausse pouvant aller jusqu’à 100 dollars.
L’essentiel de l’augmentation actuelle des prix des carburants à la pompe résulte avant tout d’une forte augmentation des cours du pétrole brut (de l’ordre de 75%), imputable d’une part, à la volonté de certains pays de l’OPEP (Arabie-Saoudite) mais aussi de la Russie de réduire leur production pour faire augmenter les prix et, d’autre part, aux sanctions américaines contre l’Iran qui entraînent une chute de la production de ce pays.
A cela vient s’ajouter le fait que le président Trump a tout intérêt à voir les cours du brut remonter pour rentabiliser la filière américaine des pétroles de schistes, aujourd’hui en grande difficulté du fait des prix bas.
C’est la combinaison de l’ensemble de ces facteurs extérieurs qui fait grimper artificiellement les prix du pétrole et explique l’essentiel de l’augmentation subie à la pompe à ce jour. S’y ajoute aujourd’hui les incertitudes liées aux fortes tensions entre la communauté internationale (Europe & USA) et l’Arabie Saoudite du fait de l’assassinat du journaliste saoudien Jamal Khashoggi.
Cette augmentation n’est peut-être que le début d’une hausse plus durable !
Tous les moyens sont bons pour accuser le gouvernement de tous les maux
En effet, la réalité n’empêche pas certains groupes et élus d’opposition de laisser entendre que le gouvernement serait à l’origine de l’augmentation des prix du carburant par la hausse de la fiscalité écologique pour financer ses réformes. Ségolène Royal, ancienne ministre de l’Ecologie, n’a pas hésité à affirmer que le gouvernement « cherche à justifier un matraquage fiscal par l’écologie ».
La ficelle est un peu grosse, elle qui est notamment à l’origine de cette contribution et qui n’a pas eu le courage de mettre en place la célèbre « éco-taxe » qui n’a pu voir le jour. Belle preuve de démagogie politique et bien étrange posture de la part de quelqu’un qui prétend défendre l’écologie ! Certains n’ont pas peur du ridicule, quitte à discréditer l’écologie auprès de nos concitoyens.
Ce qui semble irriter au plus haut point certains automobilistes est le fait que le prix du gazole est en passe de rejoindre celui du SP95, et prochainement de le dépasser, en raison de l’augmentation progressive de la TICPE.
La contribution climat-énergie a été mise en place en 2014 en France par Mme Sigolène Royal fort justement. Il s’agit d’une composante de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TCIPE, ancienne TIPP) proportionnelle au taux de dioxyde de carbone contenu dans les carburants concernés. Elle évolue à la hausse depuis 2015 et jusqu’en 2022 selon un barème prévu. Le gazole étant le plus chargé en CO2 explique la plus forte hausse de cette contribution et la réduction progressive de l’écart de prix entre le gazole et le SP95.
Cette évolution n’est absolument pas nouvelle puisqu’elle remonte à 2015 et qu’elle avait été très largement commentée à l’époque dans les divers médias.
Ces personnes sont de parfaite mauvaise foi puisqu’elles avaient connaissance de cette évolution qui vise à réduire progressivement le niveau de CO2 dégagé par les véhicules automobiles. Voici au moins 4 ans déjà que chacun sait que les véhicules équipés de moteurs thermiques et notamment les diesels ont vocation à être pénalisés par la fiscalité écologique et que, de fait, le prix doit rejoindre celui des autres carburants. Voici quelques mois, la France après d’autres pays, s’est d’ailleurs engagée à interdire les véhicules thermiques dès 2040 et cela les français ne peuvent continuer à l’ignorer.
D’une manière plus générale, en raison du changement climatique en cours mais aussi des problèmes de santé générés par la circulation automobile dans les villes (près de 50 000 morts en France tous les ans), il est parfaitement connu de chacun depuis plus de 20 ans que l’utilisation des véhicules thermiques est condamnée à brève échéance et qu’il faut nécessairement s’adapter et revoir entièrement son mode de vie.
Heureusement, de nombreux citoyens responsables l’ont compris depuis bien longtemps et intègrent ces données dans les décisions quotidiennes.
Face à l’urgence climatique, un gouvernement responsable se doit de faire évoluer les comportements de ses concitoyens
Pourquoi certains français, en bons vieux gaulois ronchons, continuent de faire comme si de rien n’était, comme si la voiture à moteur thermique n’était pas condamnée ? Pourquoi choisir d’habiter à des dizaines de kilomètres de son lieu de travail alors que nombreux sont ceux qui peuvent généralement résider à proximité, souvent à des prix compétitifs et avec toutes les commodités ?
Pourquoi s’éloigner à tout prix des villes et villages, loin des grands axes de communication et des transports en commun, si ce n’est le plus souvent pour de simples convenances personnelles ? Pourquoi utiliser si peu les transports en commun, généralement sous-utilisés et qui pratiquent des prix très bas ? Pourquoi le co-voiturage ou les autres mobilités comme le vélo, la marche à pied sont si peu développées en France ? Pourquoi continuer à rouler dans de gros et puissants véhicules diesels, fortement émetteurs de CO2, alors qu’il existe des véhicules bien mieux adaptés qui peuvent remplir les mêmes fonctions ? Pourquoi rouler à des vitesses excessives alors que le 80 km/h permet de faire des trajets dans des conditions de temps et de sécurité tout à fait satisfaisantes, tout en ayant de faibles consommations ?
Il appartient à chacun d’être responsable et d’assumer ses choix plutôt que de faire porter ses propres responsabilités sur les autres. A cet égard, les élus seraient mieux inspirés de donner l’exemple et de soutenir la fiscalité écologique mesurée mise en œuvre courageusement par le gouvernement.
Pourquoi accuser un gouvernement qui ne fait qu’appliquer la loi et veiller à la protection de la santé des français ? Pourquoi certains hommes politiques jouent les vierges effarouchées en tentant de faire croire que le gouvernement « matraquerait » ces pauvres automobilistes qui ne seraient des victimes innocentes ?
Une fois de plus, en France aussi, le populisme le plus primaire pointe son vrai visage en n’hésitant pas à manipuler nos concitoyens qui se sont laissés eux-mêmes piéger par le tout automobile. A défaut de véritable projet politique d’avenir à long terme, ces élus irresponsables sont prêts à tous les mensonges pour s’attirer la sympathie des électeurs au mépris de l’intérêt général.
Comme l’a déclaré le porte-parole du gouvernement : « On ne peut pas avoir un combat sincère pour l’écologie et dire : on ne change rien à nos comportements… ». Pour le Premier ministre, Édouard Philippe, il s’agit « d’une mesure courageuse qui vise à mettre en place la transition écologique que beaucoup de français attendent… ».
Comment ne pas être d’accord avec le président de la République lorsqu’il déclare que « tout le monde râle sur … l’essence et le diesel » mais en même temps, « on ne peut pas, dès qu’il y a un problème, appeler l’Etat à l’aide et juger que c’est insupportable quand il souhaite faire évoluer les comportements, en particulier pour protéger la planète… » et plus généralement les français !
Seul compte l’intérêt général, celui du pays dans sa globalité, et non la gestion des affaires courantes en faisant plaisir aux électeurs en leur laissant croire qu’il est inutile d’exiger d’eux le moindre effort. Si nous voulons préserver l’avenir des générations futures, comment refuser de faire quelques petits efforts ? Oui le monde change et ce qui était possible hier ne sera probablement pas possible demain parce que nous avons été trop égoïstes et irresponsables par le passé.
Reconnaissons-le et agissons en conséquence tant qu’il en est encore temps.