Depuis son élection en mai dernier, tout le monde s’accordait à dire que le président Emmanuel Macron avait réalisé un début de mandat sans-faute, avec une communication totalement maîtrisée.
A la veille du 14 juillet, les français ont pu découvrir, non sans une certaine surprise, une autre facette du président. Ce dernier a directement mis en cause le chef d’État-Major des armées qui, selon lui, se serait livré publiquement à des critiques à l’encontre du gouvernement, et indirectement au chef de l’État, en réponse aux mesures d’économies budgétaires de 850 millions d’euros annoncées quelques jours plus tôt.
Le chef de l’Etat s’est livré publiquement à une admonestation en bonne et due forme du chef d’État-Major des armées, le général 5 étoiles Pierre De Villiers. Devant un parterre d’officiers supérieurs de l’armée, il a affirmé que les propos tenus en public par le général n’étaient pas acceptables, rappelant qu’en la matière, lui seul en tant que chef des armées, était maître à bord… Pour faire simple : « Le chef, c’est moi ! ».
Après 5 années de laisser aller à la tête de l’État français, cette forme d’autoritarisme a d’autant plus stupéfait les français que depuis son élection, le président n’avait eu de cesse d’adresser des signes de respect envers les forces armées.
Cette admonestation publique du général De Villiers, un homme au parcours exemplaire à la personnalité forte, par le chef de l’Etat paraît d’autant moins acceptable à une majorité de français que les propos incriminés ont été tenus devant la Commission de la Défense de l’Assemblée nationale, exclusivement composée d’élus de la nation. Qu’y-a-t-il de plus normal que le responsable en chef des armées, dont les forces sont engagées dans de nombreuses opérations militaires difficiles, ne mette en garde les plus hauts responsables de l’État face au manque cruel de moyens de l’armée sur le terrain que les dernières restrictions budgétaires ne vont faire qu’accentuer ?
Peut-on dans ces conditions, sans mettre gravement en péril la vie des militaires sur le terrain, continuer à intervenir aux quatre coins de la planète ? Assurément non. Au cas particulier, le général Pierre De Villiers n’a fait que son travail, même si cela a déplu au président. Au demeurant, si désaccord il y avait, pourquoi l’avoir reconduit dans ses fonctions pour le forcer à la démission quelques semaines plus tard ?
Comment en effet, le chef d’État-Major des armées, pourrait-il conserver sa crédibilité en acceptant sans broncher une amputation aussi importante de son budget alors que les opérations extérieures demandées par le chef de l’État ne cessent de s’amplifier et de grever le budget des armées ? Si nul ne conteste la nécessité de réduire les dépenses publiques, pourquoi en faire porter l’essentiel (prés de 1/5) aux seules forces armées dont on connaît le dénuement ?
Rappelons tout de même que le ministère de la Défense à qui on demande sans cesse de nouvelles interventions sur les divers théâtres d’opérations militaires, a vu la part de son budget passer de 2,5 % du PIB en 2010 à 1,8 % aujourd’hui ! Difficile dans ces conditions de disposer d’une armée opérationnelle et performante. De ce seul point de vue, les propos du général De Villiers devant les parlementaires étaient pleinement fondés.
Lors de la campagne présidentielle, le candidat Emmanuel Macron ne s’est-il pas engagé à porter ce même budget de la défense à 2 % du PIB en 2025 ? Drôle d’attitude pour qui veut augmenter le budget de la Défense de commencer par le baisser au moment où les tensions internationales sont au plus haut. Pourquoi de telles contradictions dans le discours alors que le niveau idéal pour maintenir une défense opérationnelle, crédible et performante exigerait de revenir au plus vite à un budget de l’ordre de 2,5 % du PIB ?
Dans les conditions présentes, cette manifestation d’autoritarisme du président Macron, lui qui comme beaucoup de politiques ne connaît strictement rien aux questions de défense, est inacceptable et ne paraît pas de bon augure pour la gouvernance du pays. Espérons que cette erreur de débutant n’est qu’un simple faux pas. En attendant, c’est notre armée qui trinque.